Le notariat numérique, déjà une réalité en France
Sous l'impulsion de l'ADSN (Association pour le développement du service notarial) et de la Chambre des notaires de Paris, le notariat s’est impliqué très tôt dans sa transition numérique. Si la loi du 13 mars 2000 - rendant possible la signature de l’acte authentique par voie électronique1– a constitué une première étape, d’autres avancements majeurs ont suivi. Pour preuve, la profession a d’ailleurs été la première d'Europe à obtenir la certification de la signature électronique sécurisée en 20072.
Illustration de l’implication du notariat sur le sujet, les événements dédiés à la transformation digitale du secteur sont désormais légion, comme le prouvent TechNot et Notaires Digital Days organisés chaque année. Pour encadrer les pratiques, le secteur a d’ailleurs adopté la Charte pour un développement éthique du numérique notariale3 en 2018, un texte visant à favoriser le développement d'un écosystème numérique vertueux et protégeant les intérêts de ses utilisateurs. Et les notaires ne comptent pas s'arrêter là puisque la Chambre des notaires de Paris a alloué un fonds d'investissement de 4 millions d'euros à l'innovation digitale du secteur. Autant d’initiatives saluées par Nicole Belloubet, la garde des Sceaux, pour qui « la profession notariale a réussi son virage numérique »2.
Le numérique, un outil indispensable au métier de notaire
En l’espace de 20 ans, les outils numériques ont su devenir indissociables de la profession de notaire. Mais loin de se cantonner à la simple signature électronique, ils prennent désormais différentes formes, le tout afin d’atteindre trois objectifs ambitieux : une sécurité maximale, le zéro papier et une relation client plus vertueuse.
Les outils numériques, gages d’une plus grande sécurité
La sécurité occupe une place centrale dans la charte adoptée par la profession. Dans ces conditions, il n’est donc pas étonnant que les notaires disposent à présent de divers outils pour protéger et authentifier les informations.
- Id.Not : déployé en 2015 par le Conseil Supérieur du Notariat (CSN), Id.Not est un système d'authentification avec un identifiant unique mis à la disposition des notaires. Son principal intérêt est de centraliser toutes les identités des notaires à travers un annuaire unique et, ainsi, de garantir le professionnalisme des intervenants.
- La Clé REAL : reprenant le format de la clé USB, elle permet aux notaires d'apposer leur signature électronique et leur sceau sur un acte électronique afin de l'authentifier. Assurant un gain d’efficacité et de sécurité, elle est régie par des règles très strictes et notamment par le règlement eIDAS (electronic IDentification and electronic trust services).
- Le Réseau REAL : les notaires disposent d'un réseau dématérialisé auquel ils doivent s'identifier personnellement à l'aide de la clé REAL. Cet écosystème leur permet d'accéder de façon protégée aux services régaliens de la profession (visioconférence, serveur MICEN, interface de la Direction générale des Finances publiques, etc.), aux applications métier disponibles en SaaS (comptabilité, traitement des actes, etc.) et à divers services digitaux.
Le digital pour tendre vers le zéro papier
Les notaires étant amenés à gérer de très nombreux actes, il est rapidement apparu indispensable de dématérialiser ces documents afin de faciliter et de sécuriser leur conservation. Pour cela, différents outils ont été mis en place et ont permis, indirectement, de viser l’objectif zéro papier.
- L'Acte Authentique Electronique (AEE) : depuis 2008, l'acte notarié peut être établi et signé par voie électronique à travers l'AEE. À condition de respecter la réglementation en vigueur, ce document numérique a la même valeur que l'écrit sur support papier comme le rappelle l'Article 1366 du Code civil4. Plus innovant encore, l'AAED (Acte Authentique Electronique à Distance) permet, quant à lui, de signer un acte authentique par voie électronique en visioconférence. Une façon de réduire l'usage du support papier et de limiter les déplacements des clients et des notaires.
- La dématérialisation des dossiers : les notaires ont l'obligation de conserver les documents officiels pendant 75 ans, nécessitant d'importants espaces de stockage pour les différents actes. Grâce à l'AEE, les documents électroniques sont désormais transmis au MICEN, le minutier central électronique des notaires. C’est ce serveur commun et sécurisé qui conserve désormais les documents dématérialisés.
Inventer une nouvelle relation client grâce au numérique
Les notaires auraient tort de penser que le numérique constitue un simple outil technique. Sa vocation est également d'inventer une nouvelle relation client, toujours plus simple, sécurisée et dématérialisée. Le développement de nouveaux services et applications en est d’ailleurs un bon exemple.
- La prise de rendez-vous en ligne : depuis 2019, les particuliers ont la possibilité de prendre rendez-vous avec un notaire en ligne, à condition que ce dernier ait choisi d'utiliser ce service. Différentes plateformes ont ainsi fleuri au cours de l'année, à l'image de NeoNotario et de NotaStart.
- La visioconférence notariale : en plus de pouvoir échanger avec leur notaire de façon sécurisée grâce à la visioconférence, les clients peuvent également signer des actes électroniques à distance à travers le système AAED.
- L’Espace Notarial : il s'agit d'une plateforme sécurisée d'échanges et d'informations permettant aux notaires de gérer leurs différents dossiers et d'interagir avec d'autres professionnels. Mais il offre également la possibilité de partager et d'échanger des documents en ligne avec les clients de l'office, facilitant et accélérant les demandes d'information. Les clients peuvent également y déposer leurs questions, directement en lien avec les documents mis à leur disposition. Preuve de son intérêt au sein de la profession, l'Espace Notarial comprend déjà 125 000 comptes utilisateurs5.
Ces technologies qui dessinent le notariat de demain
Comme le démontre le fonds d’investissement de 4 millions d’euros consacré à l’innovation, les notaires semblent bien décidés à poursuivre leur transformation numérique. Plusieurs outils en phase de développement pourraient d’ailleurs incarner le notariat de demain.
- La blockchain : actuellement à l'étude, la technologie vise à favoriser la reconnaissance automatique des documents et à en définir de nouvelles méthodes d'analyse. La première application permettant de simplifier le transfert des actes vers MICEN, la seconde servant à optimiser les éventuels audits.
- La démocratisation de la procédure ANF : progressivement mis en place, le projet ANF permet aux notaires d'accéder au fichier immobilier, sans avoir besoin de l'intervention des services de la publicité foncière. Une petite révolution qui simplifie l'usage de la documentation hypothécaire et des demandes qui y sont liées.
- L’intelligence artificielle : mais c’est bien le développement progressif de l’IA qui constitue la principale révolution technologique attendue par le notariat. Capable d’apprendre par elle-même, la technologie permettra d’automatiser les tâches basiques et de simplifier la rédaction des actes, tout en assurant un meilleur traitement de l’information.
Sources
1LOI no 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique - Legifrance
2Transition numérique : les notaires à la pointe - Affiches Parisiennes - 2019
3Une Charte pour un développement éthique du numérique notarial - Notaires.fr - 2018
4Article 1366 du Code civil – Legifrance
5Espace Notarial - Paris Notaires Services – 2018
6L’Intelligence Artificielle, au service des notaires ? - Notariat2000 - 2018