Publié le 21/03/2019
Le terme intelligence artificielle, ou IA, est parfois mal utilisé . Il convient de distinguer l’« IA faible », dont le fonctionnement est limité et prédéfini, de l’IA forte. Cette dernière peut croiser plusieurs technologies - Data, « deep-learning », algorithmes neuronaux, ordinateurs quantiques etc. qui permettent de simuler le processus d’apprentissage humain pour améliorer celui des machines. Dans ce cas, l’homme programme la machine, mais celle-ci apprend et s’améliore en autonomie. L'explosion récente de la puissance de calcul informatique et le nombre croissant de données récoltées laissent à penser que nous ne sommes qu’au début de l’IA et que ses applications ne vont cesser de grandir, de s’étendre et de s’améliorer. Des perspectives qui suscitent de nombreux espoirs dans les entreprises, tout comme de multiples craintes, notamment pour l’emploi.
Si l’artisanat n’est pas le secteur le plus touché par les progrès de l’IA, elle y couvre déjà plusieurs champs d’application. Et ce n’est qu’un début. Même les activités les plus créatives, et donc a priori humaines, se voient rattrapées par les capacités de l’IA. Preuve en est la sortie en 2017 d’un album musical composé entièrement par une intelligence artificielle, ou encore la vente, à hauteur de 432 500 dollars, fin 2018, d’un tableau peint grâce au principe de deep learning (apprentissage automatique profond).
Côté relation client, des chatbots seront bientôt en mesure d’apporter des réponses précises aux interrogations de vos clients, sur les matériaux de menuiserie qui correspondent le mieux à leur projet par exemple. Votre fonctionnement interne pourra lui aussi être impacté : l’IA sera capable de détecter des erreurs ou anomalies dans vos commandes ou de vous épauler dans la gestion des risques. Dans le secteur du BTP par exemple, les risques liés à un chantier pourront être évalués en analysant les données de vos projets précédents.
Si l’artisanat peut, par ces progrès technologiques, bénéficier de nombreuses facilités, il reste dans l’ensemble l’un des secteurs les moins impactés par les progrès de l’intelligence artificielle. La raison ? Si ces nouvelles technologies sont dotées des capacités de calcul et d’analyse bien supérieures à celles des hommes, certains comportements ou gestes simples, souvent rendus possibles par des micromouvements de compensation opérés par le cerveau humain, demeurent extrêmement difficiles à reproduire par une machine. Les compétences artisanales ont donc de fortes chances de prendre de la valeur au cours des prochaines décennies.
Pour savoir si l’IA sera bénéfique au secteur, la Chambre des Métiers et de l’artisanat du Val de Loire a interrogé les artisans en août 2018. Parmi les principaux domaines d’activité où l’IA, selon eux, devrait leur être utile, on trouve dans l’ordre : la sécurité pour 83 % des répondants, la maintenance pour 76 % d’entre eux, et la production à 75 %. Ces trois secteurs arrivent largement en tête des réponses collectées par la CRMA Centre-Val de Loire, devant la facturation et le transport (63 %) ou encore la réduction des déchets (60 %).
Parmi les principaux bénéfices que disent attendre les artisans : la réduction des tâches dangereuses (75 %) et par conséquent l’amélioration de la sécurité. Vient ensuite la limitation du risque d’erreur (73 %), particulièrement vrai pour la maintenance et la production. Suit enfin la diminution de la pénibilité (65 %).
Mais les artisans ne voient pas que des avantages à l’utilisation de l’IA dans leur quotidien professionnel. Première menace identifiée, les problèmes d’ordre éthique (65 %) avec notamment l’utilisation intensive des données personnelles. Le Règlement général sur la protection des données (RGPD) devrait ainsi aider les artisans à respecter la confidentialité des données récoltées auprès de leurs clients. Mais au prix de complexités supplémentaires.
Autre risque identifié, la déshumanisation du travail (61 %) et notamment la crainte d’une perte de lien social dans l’entreprise mais aussi avec le client. Enfin, les artisans s’inquiètent du coût humain. 55 % d’entre eux craignent des destructions d’emplois directement liées à l’adoption de l’IA dans leur secteur dans les prochaines 5 années.De manière générale, 17 % l’envisagent d’ailleurs plus comme une menace que comme une opportunité (40 %) pour leur entreprise ou leur métier (respectivement 20 % et 33 %).
Face à ce constat, les artisans attendent un vrai accompagnement de l’État. Ils sont ainsi 74 % à espérer que les pouvoirs publics accompagnent l'introduction de l'intelligence artificielle dans les TPE, en leur proposant une aide financière à l'investissement (83 %) ou grâce à des dispositifs adaptés de formation (71 %).