Publié le 03/01/2020
Le Code civil établit des règles concernant les ouvertures, les portes et fenêtres, les clôtures et les plantations, notamment.
Votre voisin veut par exemple ouvrir une fenêtre qui donne une vue plongeante sur votre bien : une distance de 1,90 m doit être respectée avec votre propriété (en ce qui concerne les vues sur le côté – qui nécessitent de tourner la tête pour voir chez vous –, une distance de 0,60 m doit être respectée avec votre propriété (article 678 et article 679).
Autre cas de figure : s'il s'avise de transformer un garage en chambre, les fenêtres ne pourront pas être à moins de 2,60 m du sol, pour un rez-de-chaussée.
À ces obligations, s’ajoutent celles du Code de l'urbanisme, qui fixe un règlement national. Mais, la plupart du temps, les communes se dotent d’un plan local d'urbanisme (PLU) ou d'une carte communale (en l’absence de PLU), dont les dispositions peuvent être plus strictes.
Avant de faire des travaux dans son domicile, votre voisin doit donc consulter le PLU. Celui-ci définit par exemple à quel niveau la surélévation d'un bâtiment est acceptable, ou quelle surface peut être ajoutée dans votre maison. Le PLU peut également définir la couleur et les matériaux les mieux adaptés aux façades.
À noter. Le Conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement du département peut également fournir aux propriétaires des informations détaillées pour mettre en place un projet de construction ou de rénovation.
En fonction des aménagements prévus, un propriétaire doit s'adresser à la mairie pour établir une déclaration préalable aux travaux lorsque ceux-ci sont de faible importance (c’est le cas de la création de portes, de fenêtres et la construction d’un mur selon l’article R421-9 du Code de l’urbanisme). Si les surfaces à créer dépassent 20 ou 40 m2 selon les cas (agrandissement de maisons, abri de jardin…), une demande de permis de construire est obligatoire.
Si votre voisin bénéficie d’une autorisation, celle-ci doit être affichée sur un panneau rectangulaire sur le lieu du chantier. De nombreuses mentions sont obligatoires, dont la description des travaux prévus (article A424-16 du Code de l’urbanisme).
N’hésitez pas à vous rendre à la mairie avec un expert, un architecte, un urbaniste ou encore un avocat spécialisé en droit de l’urbanisme. Vous pourrez consulter le dossier de demande de permis de construire et vérifiez qu’il soit conforme au PLU ou à la carte communale. Le professionnel vous aidera à décrypter ces documents et à détecter d’éventuelles irrégularités.
Votre voisin construit une terrasse à l'étage et crée un vis-à-vis sur votre jardin ? Il surélève sa maison et dégrade vos conditions d'ensoleillement ? L’aménagement envisagé empiète sur votre propriété ou enclave votre bien ? Sachez qu’il est possible de contester la déclaration préalable ou le permis de construire si vous estimez que les aménagements auront un impact négatif sur les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de votre bien. Pour ce faire, munissez-vous de photographies, de rapports ou d’attestations d’experts pour appuyer vos dires.
À noter. Votre contestation doit porter sur le projet, et non sur les nuisances qui pourraient être occasionnées lors des travaux.
La première chose à faire est de tenter un recours gracieux auprès du maire qui a délivré l'autorisation :
adressez-lui une lettre recommandée avec accusé de réception. Un modèle est disponible sur service-public.fr.
- envoyez un exemplaire du courrier à votre voisin titulaire du permis de construire. Attention, vous devez lui faire parvenir dans les 15 jours suivants le dépôt de votre recours à la mairie. Conservez une copie de l'ensemble de vos courriers.
- détaillez les raisons qui vous poussent à effectuer ce recours : le PLU n'est pas respecté, votre propriété serait dévaluée par l'aménagement projeté...
- ajoutez au courrier une copie de la déclaration préalable ou du permis de construire que vous contestez, ainsi que tous les documents que vous jugez utiles.
Vous avez 2 mois pour effectuer cette démarche et le maire a 2 mois pour vous répondre. Sans réponse dans ce délai, votre recours est considéré comme rejeté. Vous devrez alors vous tourner vers le tribunal administratif.
Bon à savoir : si votre voisin n’a pas affiché son autorisation de travaux, elle peut être contestée auprès de votre mairie pendant 6 mois à partir de l'achèvement des travaux, sans pour autant être illégale.
Dans les 2 mois qui suivent le premier jour d'affichage de l'autorisation ou du permis de construire, vous pouvez saisir le tribunal administratif dont dépend votre commune pour en demander l'annulation. Ce délai peut être repoussé si vous avez préalablement effectué un recours gracieux.
Attention, vous devez informer votre voisin ainsi que la mairie du recours intenté par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de 15 jours francs.
Le recours à un avocat n'est pas obligatoire, mais il est fortement conseillé de vous faire assister pour vous assurer que l’action est recevable.
Vous allez devoir en effet démontrer votre « intérêt à agir », comme disent les juristes.
Celui-ci dépend de plusieurs critères :
- la distance entre votre habitation et la construction décrite par le permis ;
- l'importance de l'aménagement envisagé ;
- les conséquences sur votre bien.
À vous de prouver que le permis de construire ne respecte pas le PLU (la surélévation prévue est trop haute, les distances minimales ne sont pas respectées, par exemple.)
Attention, si votre recours est considéré comme abusif par le juge il pourra vous obliger à dédommager votre voisin.
Bon à savoir : si votre voisin n’a pas affiché son autorisation de travaux, elle peut être contestée auprès du tribunal administratif pendant 6 mois à partir de l'achèvement des travaux, sans pour autant être illégale.
En parallèle de la requête en annulation du permis, vous pouvez déposer un référé suspension auprès du tribunal administratif. Pour qu'il soit accepté, la situation doit être urgente et la légalité du permis de construire, sérieusement contestable. Le recours en référé suspension doit être introduit au plus tard dans les 2 mois après la requête en annulation du permis.
Le juge dispose d’un mois pour rendre son ordonnance de référé. Si le juge rend une ordonnance de suspension des travaux, votre voisin devra immédiatement les faire arrêter. Si ce dernier n’obéit pas, il risquera 75 000 € d'amende et/ou 3 mois d’emprisonnement.
Dans le cas où le juge a rejeté votre demande, vous pouvez encore effectuer un recours devant le Conseil d’État, dans les 15 jours suivant sa déclaration.?
Lorsqu’une construction est terminée, mais que le permis est annulé, vous pouvez en demander la démolition devant un tribunal de grande instance. Vous devrez obligatoirement être assisté d'un avocat. Le délai de 2 ans démarre à partir de la décision définitive d'annulation du permis de construire.
Attention. L’annulation du permis seul ne permet pas d’obtenir la démolition de la construction : le juge doit vérifier qu'il n'est pas possible de mettre la construction en conformité avec les règles en vigueur, et que vous apportez la preuve d’un préjudice direct et personnel (perte d'ensoleillement, emprise sur votre propriété, nuisances sonores ou visuelles). Vous avez donc tout intérêt à joindre un constat d'huissier à votre dossier ! Il peut être utile aussi de demander son avis à un géomètre expert, ou encore à un architecte.?
Bon à savoir : si la demande de démolition suite à l’annulation du permis n’aboutit pas, il est toujours possible d’obtenir des dommages et intérêts. L’annulation ou l’illégalité du permis doit avoir été constatée au préalable par le juge administratif, et l’action en responsabilité civile à cet égard doit avoir été engagée dans les deux ans qui suivent l’achèvement des travaux.
Le juge a validé le permis de construire de votre voisin. Vous pouvez toutefois obtenir des dommages et intérêts, à condition de prouver votre préjudice sur la base de la responsabilité civile de votre voisin pour trouble de voisinages. Vous avez 5 ans pour agir, à compter de la fin des travaux, en saisissant le juge civil.
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Sources :
- Code civil
- Code de l'urbanisme
- Service-public.fr