Publié le 29/09/2023
Le système de retraite est confronté aux effets du vieillissement démographique qui déséquilibrent son mode de financement. Depuis les années 90, les réformes se succèdent pour assurer la pérennité financière du modèle par répartition. Zoom sur les grandes étapes de l’Histoire et des réformes du système de retraite français, avec un regard sur la situation des autres pays en Europe.
Les prémices remontent à l’époque de Colbert qui a créé, en 1673, sous le règne de Louis XIV, le premier régime de retraite pour les marins. Mais ce n’est qu’en 1945 que le système de retraite français est véritablement né avec la création de la Sécurité sociale, dont la branche assurance vieillesse, et la mise en place du régime général de retraite pour les salariés du secteur privé (hors salariés agricoles). D’autres régimes professionnels coexistaient déjà ou ont vu le jour par la suite, comme le régime de retraite des indépendants, en 1949, avec la création d’une caisse spécifique pour chaque catégorie professionnelle (artisans, commerçants et industriels, professions libérales).
Fondé sur un principe d’équité, le système de retraite applicable à l’ensemble des travailleurs français fonctionne par répartition : les cotisations versées par les actifs financent la même année les pensions des retraités, tout en créant des droits pour leur future retraite.
En 1945, l’âge légal de départ en retraite a été fixé à 65 ans, avec une durée de cotisation minimale de 30 années pour percevoir une retraite complète. Sous la présidence de François Mitterrand, l’âge légal de départ en retraite a été ramené à 60 ans en 1982, sous condition d’avoir cotisé pendant 37,5 ans dans un ou plusieurs régimes de base.
En 1991, un livre blanc sur les retraites a soulevé, pour la première fois, la problématique du vieillissement de la population sur l’équilibre du système de retraite : avec l’allongement de l’espérance de vie, l’augmentation de la part de pensionnés par rapport au nombre de cotisants, creuse progressivement le déficit financier du système.
Les pistes de propositions pour compenser ce déséquilibre ont inspiré les réformes du système de retraite qui ont suivi ce livre blanc.
Cette réforme a mis en œuvre pour le régime général des salariés :
Un nouveau diagnostic présenté dans le rapport Charpin en 1999, faisant état de déficits dans la plupart des régimes de retraite, a notamment débouché sur la création du Fonds de réserve des retraites (FRR) en 2001 afin d’aider au financement des retraites des générations du papy-boom.
Le rapprochement entre les différents régimes de retraite a débuté à partir de cette réforme Fillon, dont les mesures prévoyaient :
Malgré les réformes précédentes, le déficit du système de retraite ne s’est pas résorbé. Il s’est même aggravé avec la crise financière de 2008, ayant atteint 32 milliards d’euros en 2010.
La réforme de 2010 a donc été plus loin dans les mesures, comprenant :
La loi du 20 janvier 2014, à l’origine de la réforme, a réaffirmé le principe de retraite par répartition avec l’objectif de le rééquilibrer à l’horizon de 2040.
Différents dispositifs applicables aux cotisants et aux retraités ont été modifiés en conséquence :
Le déficit du système des retraites, amplifié par les effets de la crise sanitaire, a atteint 18 milliards d’euros en 2020 (réduit à 13 Mrds d’euros grâce à un versement de 5 Mrds d’euros par le FRR). La reprise économique en 2021 a permis une embellie, mais en l’absence de réforme, le Conseil d’orientation des retraites (COR) estimait que le besoin de financement du système de retraite, de nature structurel, perdurerait jusque dans les années 2040. Selon les scénarios économiques, le déficit aurait atteint 10 et 16 milliards d’euros à l’horizon 2030 sous l’effet de la baisse du nombre de cotisants par rapport au nombre de retraités, liée au vieillissement de population.
Pour rééquilibrer les comptes tout en conservant un système juste, la réforme de 2023, issue de mesures proposées par le président Emmanuel Macron, accélère certaines dispositions de la réforme de 2014 et apporte des améliorations de fond. La loi portant la réforme, promulguée le 14 avril pour une entrée en application le 1er septembre 2023, prévoit notamment :
Les disparités en matière de système de retraite sont nombreuses en Europe, ce qui rend difficile les comparaisons d’un pays à l’autre. Les différences les plus visibles concernent le calcul des droits et l’âge de départ à la retraite.
Trois principaux modes de calcul des droits à la retraite coexistent en Europe :
L’âge légal de départ à la retraite en Europe est en moyenne autour de 65 ans. L’Islande et l’Italie ont déjà fixé l’âge minimum à 67 ans, tandis qu’en Suède, Norvège et en France, il est encore à 62 ans. La Suède a d’ores et déjà prévu de le relever à 64 ans d’ici à 2026, mais dans les faits, l’âge effectif moyen de départ à la retraite des Suédois est de 65 ans (contre 63 ans en France) car le système encourage les départs à la retraite plus tardifs pour améliorer le montant de la pension. Dans certains pays, l’âge légal de départ à la retraite dépend de la durée de cotisation, comme en Allemagne où elle est fixée à 45 ans, contre 40 ans au Portugal et en Grèce. En Autriche, Bulgarie, Pologne, République Tchèque, Roumanie et Suisse notamment, les femmes peuvent prendre leur retraite avant les hommes, mais les écarts d’âge sont amenés à se réduire d’ici à 2030.
Tous les pays européens sont confrontés à la même problématique d’équilibre financier de leurs régimes de retraite, face à un nombre croissant de retraités et à un manque d’actifs. Selon des projections des Nations Unies, le ratio entre le nombre de personnes de plus de 65 ans et en âge de travailler (20-64 ans) qui a accéléré depuis 2010 doublera d'ici à 2060 dans les pays de l’OCDE (1).
Pour tenir compte du vieillissement démographique, quelques pays ont commencé à réformer leur système de retraite, notamment en relevant l’âge de départ en retraite. La Suède - dont le système de retraite flexible a inspiré la future réforme en France - a même prévu d’indexer l’âge minimum de départ à la retraite sur l’espérance de vie à compter de 2026. Certains pays ont opté ou envisagent des mesures d’encouragement à travailler plus longtemps, tels que la Grèce et la Slovénie (en facilitant le cumul emploi-retraite), la Hongrie, l’Espagne ainsi que la Suède qui a mis en place un âge de retraite cible (67 ans en 2027 puis 69 ans au-delà).